mercredi 8 décembre 2010

ecran de neige



Jour de neige. Paris. Après-midi off.


Les premières heures d'aujourd'hui ont été difficiles. Tiraillées. Inquiètes.
Puis le soleil s'est levé, bien après qu'il eut commencé à faire jour.
Un jour blanc dehors.
Un jour gris dedans.

Les jours de neige, à Paris, gomment les reliefs. Gomment les bruits. Les tumultes urbains sont en sourdine. Les nuances de gris et de greige de la ville sont en veille.
Chet succède à Luis.
Alors.
Avant que la boue ne remplace les tapis ouateux. Avant que les flaques ne succèdent aux souplesses neigeuses. Avant que les traces inaugurales ne soient remplacées par les piétinements inutiles.
Alors....
Alors, dans ce demi silence blanc, la place est nette pour ses errances personnelles. Pour les pics et les gouffres. Pour les cacophonies et les mutismes. Pour ses sentiments. Pour leurs résonances. Leurs échos.
Ajoutez à cela une pointe d'incertitude. La plus intime. La crainte la plus pure.

Des examens médicaux intrusifs. Aiguilles. Carottages. Des écrans renvoyant des images de soi indistinctes, indéchiffrables. Impudiques au micron près. Des images à peine capturées que sitôt mesurées. Archivées. Fixées dans leurs anomalies métaboliques.
Des odeurs écoeurantes de peurs, d'incertitudes. Les statistiques.
Une salle d'attente bondée. Pleine de doutes, de renoncements, d'optimisme et d'espérance. Une salle d'attente pleine d'humanité.
Et voici dans ma tête une pièce qui vole en l'air. Pile? Face? What the fuck!

Reste à attendre les résultats.
10, 12 jours. Fois 24 heures. Fois 60 minutes. Fois les absences. Fois les silences. Fois les "si" à peine avoués. Fois tous les moments dédiés à des âmes choisies. Et aussi à lui.
Un examen, on le rate ou on le réussit. C'est binaire. Et c'est idem, qu'il soit médical ou non.
Après et avant, il y a la "vraie" vie.
Jamais binaire. Sans diagnostique imparable. Ni blanche, ni noire.

Comme ces snow days.
Je vais attendre.
La pièce sur la tranche, pour ce qui du diagnostique médical.
Dans cette attente, entre deux "si", une certitude est installée. Ne plus perdre de temps par ailleurs.
Juste le passer avec lui. En gouter les sucres et les acides. Le savourer. Le temps construit ensemble a "de la gueule", à défaut d'avoir les attraits classiques et harmonieux des ronroncoulades des squatters des bancs publics, neigeux ou secs.

Une pièce sur la tranche. Soit. Mais son ombre n'est pas froide.

dimanche 17 octobre 2010

le jour avant de partir...


Dimanche, fin d'après midi.
La journée est morne et s'étire difficilement vers minuit.
Pourtant, il y a quelques heures...
Un réveil finalement matinal après une soirée d'amitié pure, assez tardive. Au réveil, teint pas très frais. Cheveux vite attachés. Tirer fort sur l'élastic pour défripper les traits.
Juste un peu d'eau sur le visage et un voile de crème, histoire de sourire sans risquer se déchirer la peau. Superposer des couches de vêtements.
L'élégance parisienne sera pour demain... ou après-demain!
Nouer les lacets de ces baskets réputées transformer les jambes des quadra, même assez tapées, en guibolles de rêves réhaussées de fessiers superbes. Bon. Ce n'est pas la cata totale, mais je me dois de faire la part des choses. Les jambes de Marlène ou d'Helena Cristensen seront pour une autre.
Je noue mes lacets en renonçant à m'exhiber en guêpière, genre Ange Bleu.
J'espére juste avoir moins de courbatures que la dernière fois. Voeu somme toute raisonnable.
Je sors de chez moi dans un accoutrement improbable. Il fait très frais.
Mes poumons redessinent leurs contours. Mon haleine fait des voiles de buées.
Je me réveille totalement.
Je mets la musique à fond sur mon "baladeur". Un mélange iconoclaste de rock, de tango, de flamenco, de soul et de funk... il est heureux que je sois la seule à en profiter...
Je traverse l'avenue entre les mères de famille qui vont au marché, caddy à la main et nez un peu rougi, et quelques mal (mâles) rasés de tous âges qui, sous prétexte d'aller chercher les croissants, s'échappent eux aussi du domicile dit familial.
Ma direction: le jardin des plantes.
Me réveiller de bonne heure, et un dimanche matin de surcroît, a pour moi les mêmes effets que rentrer à l'aube en semaine, juste avant d'attaquer une journée de travail: un effet euphorisant. Quelque soit la fatigue, laisser de la place au sentiment assez magique de voler la vedette à la routine. Gagner du temps sur l'inutile. J'accepte sans broncher l'obligation, facile à assumer, de devoir en profiter, d'en goûter chacune des secondes.
Un vrai luxe.
Certe, pas le "luxe" d'avoir les yeux cernés, la joue molle et le teint frippé (ce que me renvoit chaque vitrine croisée sur mon parcours).
Mais, celui d'avoir la conscience d'être très privilégiée, de pouvoir savourer ce "temps en plus", sans contrainte, par plaisir.
Par plaisir... vite dit.
Je suis au jardin des plantes, à marcher avec ces baskets improbables.
Des engins high-tech, qui coûtent un bras, et ont la particularité de donner le sentiment de marcher sur des sandales japonaises. Des coussinets à la base des orteils déséquilibrent la marche. Du coup, pour ne pas tomber en avant, comme une loque, on ne roule pas totalement son pied en marchant. On s'arrête avant. On force sur le mollet, les cuisses et les fesses.
La suite est que:
première option - si vous êtes top modèle, vous prenez un billet de 100.000 et quelques en posant nue avec ces baskets pour une pub, ou
deuxième possibilité- si vous n'êtes que vous... vous avez des courbatures, une nouvelle paire de chaussures à caser dans le placard et 90 euros en moins.
Je ne suis pas top modèle et mon placard déborde de paires de chaussures plus ou moins étonnantes.
Presque 2 heures à marcher au jardin des plantes au rythme de ma play-list un brin déjantée.
La marche n'est pas très "courue" de ce côté-ci de l'atlantique. J'avoue également que le jardin des plantes a très peu à voir avec central park.
Donc, je me distingue au milieu des joggers aux foulées plus ou moins aériennes, aux bras plus ou moins ballants, aux tenues plus ou moins moulantes, mais assez systématiquement très peu flatteuses.
Le jardin, lui, est superbe.
En marchant, je peux profiter de chaque nuance, de chaque mouvement alentours.
Mon souffle n'est pas court. Je ne suis pas totalement centrée sur mon effort.
Je contracte mes abdos, le dos, et je maîtrise la position de mes côtes.
Je marche sans poids, mon point de gravité presque en apesanteur au fur et à mesure des foulées. Hormis cette concentration de posture, pour le reste, mon attention est totale.
Des enfants chamboulent les feuilles mortes à terre, à grands coups de traînements de pieds.
Des joggers "mâles urbains" essaient de garder un air "I'm so sexy with some effort", sans y réussir totalement. Des jeunes femmes convoquent à chacune de leurs foulées les foudres jalouses et vachardes de leurs contemporaines moins sveltes et légères. D'autres, les pieds lourds et la fesse arythmique, ne font que conforter, à chacun de leur pas, les fans de ce cher Winston, dont je suis... et me voici à expirer en les croisant des "no sport" embués mais puissants de conviction!
Ces 2 heures de marche matinale me font finalement un bien fou.
Je marche, je me gèle, je me moque, je me régale de la contemplation de ce jardin des plantes, si peu désuet finalement, et, je me courbature avec un plaisir avoué.
Puis, je rentre.
Je passe par le marché.
Quelques fruits et légumes.
Un saut chez le fromager.
Faire un crochet chez le caviste. Quelques nectars et autres bouteilles. Il me met en boite avec mon côté sportive du dimanche. Il a ma bénédiction et mon appui. J'en rajoute. Je suis assez réveillée et lucide pour me ficher de moi... la journée s'annonce prometteuse.
Retour à la maison.
Je tente d'éviter les voisins en rentrant. Inévitablement, sans succès. Et je supporte leurs regards narquois et sceptiques...
Je rentre dans ma grotte.
Midi.
Il est l'heure à laquelle je me levais il y a encore quelques temps, à laquelle je me lève parfois, moins souvent...
La journée déploie toutes ses promesses et je suis en éveil.
Je profite.
Dans 2 jours je pars loin. Au soleil.
Face à un océan qui, pour une fois, n'est pas l'atlantique.
Quasi deux semaines off.
Je laisse en pension, aux parisiens, le jardin du Luxembourg, le Palais royal et la terrasse du Nemours, le jardin des plantes, ses massifs, ses allées et ses verrières, la lumière rasante d'automne.
Je laisse le marché et ses maraîchers.
Je confie mon caviste, sa gouaille et ses vins plus ou moins souples, goûteux, fruités, etc.
Moi, je retrouverai tout cela plus tard.
Je serai alors plus calme. L'horizon sera plus loin dans mon regard. Mes gestes plus souples.
Enfin reposée.
Enfin, je l'espère.
Et alors, je serai forcément heureuse de retrouver tout ce que j'avoue laisser.
Et je retrouverai tout le reste, aussi, et ce que je tais.
Ce sera l'hiver.
Il fera vraiment froid. Les journées seront plus courtes. Noel s'annoncera, et je ferai comme si cela ne me minait pas.
Pour le moment, juste le jour qui suit.
Carpe Diem et protection solaire.
Dans la nuit, la veille du départ, je ferai la valise. Retrouver les maillots de bain. Ajouter quelques accessoires.
Croiser les doigts pour que les avions décollent et que je puisse accéder à l'aéroport.
Puis arriver après 12 heures de vol.
Profiter de la limpidité de l'eau, de l'air.
Profiter de chaque bout de soleil sur les épaules, sur le front, sur le dos.
Nager. Plonger. Plonger. Re plonger. Sombrer dans un sommeil, même intermittent.
Switch off.
Et revenir.
Alors, la peau gardant encore le toucher du soleil, remettre cet accoutrement improbable, ces baskets high tech, prendre le chemin du jardin des plantes.
Marcher très concentrée.
Alors...
Alors, je m'arrêterai, certainement, un drôle de sourire aux lèvres, dans la buée de mon haleine. Alors je m'arrêterai, certainement, devant le carroussel, le "Dodo Manège". Devant ses Dodos, ses éléphants. Il n'y aura plus de feuilles mortes à chambouler en courant.
Et je reprendrai ma marche. Incongrue au milieu des joggers.
Et je retournerai me faire vanner par mon caviste, acheter des fruits, et attendre qu'un autre dimanche se termine dans mon canapé, au creux d'une autre fin de semaine.
Mais alors, j'attendrai qu'un autre dimanche se termine dans mon canapé, au creux d'une autre fin de semaine... mais, alors, j'attendrai en débronzant doucement, le plus doucement possible.

dimanche 19 septembre 2010

la louve aphone et l'ours qui dansait


C'est une fable, sans morale, une histoire décalée, une sorte de conte.

L'histoire d'une louve.
Sous ses mamelles ni Romilus, ni Remus. Juste des souvenirs choisis, et aussi des envies d'ailleurs, sans discernement, vagabondes. Deux des sources qui nourrissent l'énergie vitale. De celle qui fonde les mondes les plus discrets. De celle qui fait les rêves et illumine le jour au delà de la lumière. Une louve muette qui fredonne dans son souffle.

C'est une fable, sans morale, une histoire décalée, une sorte de conte.

L'histoire d'un ours.
Sous ses griffes plus de trace des chairs écharpées. Sous ses crocs pas de peine à vif. Un ours qui glisse au seuil de l'hibernation. Il y entre ou en sort. Ce n'est pas l'objet. Il est riche des réserves presque intactes de ses étés. Riche de ce qu'il en a préservé. Les orages de chaleur ont laissé leurs zébrures inscrites.

C'est un ours qui savait danser sur un fil. Un ours qui reste en boule. Sous un ciel zébré. Couvant ses étés. Ménageant son éveil.

C'est une louve qui nourrit la source, pour d'autres aussi. Une louve qui voudrait parfois pouvoir hurler des airs légers, célestes. Frôler la lune du plat de sa voix, comme une main renforcerait un dos dans une caresse.

L'ours a gardé pour lui la légereté des danseurs de fil, qui défient tous les risques. Il ne partage que son miel. L'ours a ses ancrages.
La louve a gardé pour elle sa lumière, qui transforme la banalité. Elle ne partage que le souffle de ses operas. La louve couve ses inconvenances.

Personne n'a su.
Personne ne peut l'expliquer.
Qui s'en serait soucié.
Qui s'en soucie vraiment.

Mais on raconte que certains ont vu une louve danser sur un fil.
On raconte que certains ont entendu chanter un ours noyé dans la lumière.
On dit que d'autres encore, avec des traces de miel sur les lèvres, ont entendu chanter leurs étés enfouis, et ont dansé sur des rayons célestes, comme des notes légères sur des portées en clef de sol, en clef de fa, en clefs des chants.

C'est une fable, sans morale, une histoire décalée, une sorte de conte.
Une manière de renouer avec ces échanges étranges.
Un courant d'air.
Un rai de lune.
Un signe.

Heureuse de vous retrouver au détour des fables, des histoires et des mots.
Que faire d'attendre que la lune soit pleine pour danser sur les fils, que faire d'attendre que la partition soit écrite pour chanter.

mercredi 14 juillet 2010

le goût de l'eau


Que dire de ces jours qui se succèdent.

Un jour soleil éclatant et chaleur enveloppante, un jour moiteur poisseuse et assommante, un jour déluge et ciel sombre, un jour orages et tonnerres, un jour atone qui s'achève sur une splendide lumière rasante.
Si ce n'est leur succession erratique, ces jours n'ont aucune nouveauté. Nous les connaissons tous, et si nous ne les avons pas encore expérimentés, on les devine. On sait imaginer leurs frayeurs, leurs peurs, leurs joies.

Du déjà appréhendé. Juste le menu qui est cul par dessus tête. Juste nous, en convives avides de maîtrise, et plus uniquement juste avides.
Et au milieu de cela, il y a des jours inédits.
Des moments sidérants.

On renoue avec un sentiment de liberté qui ne correspond à aucune volonté d'échapper. Une liberté pure: savourer des moments neufs.
On se retrouve étonné soi-même d'avoir laissé la place à des moments qui ne se définissent ni en référence, ni par défaut.
On se retrouve étourdi, presque abasourdi d'avoir laissé l'inattendu prendre place.
Déstabilisé.
A cent lieues des calculs et volontés, à cent lieues des mises en scène aussi plaisantes qu'elles soient (et soie).
On se retrouve faire face à des moments d'exception comme celui de retrouver le goût de l'eau.
Se retrouver surpris.
Un goût qui cascade et navigue, des papilles qu'elle a noyées, du dessous de la langue sur laquelle elle roule, de l'intérieur des joues qu'elle habille. Un goût qui irradie dans l'ensemble du corps, et l'esprit. Une certaine fraîcheur, du calme, une énergie sidérante.

Retrouver le goût de l'eau.
Ce serait comme retrouver les rires spontanés, les regards clairs.
Ce serait comme échapper à nos intuitions, à nos raisonnements, à ce que l'on sait déjà devoir attendre ou craindre, ce que l'on espère. Ce serait comme ne plus rien savoir.
Le goût de l'eau.
Un goût étranger à nos sphères habituelles, raisonnées ou instinctives, raffinées ou primales, solitaires ou collectives, communes ou transgressives.

On peut dire que l'eau n'a pas de goût. Qu'il n'y a pas plus commun. Que l'on en boit tous les jours.
On peut réfléchir... trop.
Se dire que l'on ne peut pas oublier un goût qui n'en a pas, donc on ne peut pas le retrouver.
On peut trouver mille autres goûts plus raffinés, plus subtiles: celui du vin, des fruits rouges, celui des épices, celui des larmes, celui du sang, celui des échanges emmêlés, celui du miel, celui du pain et des olives noires, celui du sel qui craque.
On peut trouver mille façons de disserter.

Et puis, quand on ne l'attend pas, l'eau éclate en bouche, se disperse en éclats.
On reprend un B, A, BA.
On tremble sur ses jambes, on revisite des chemins mille fois dévalés.
Et on se retrouve surpris. Fourbu. Une lumière au creux du poing. Une trace de peau sous les doigts.
Et on se tait.
Et revient et s'impose une photo de Willy Ronis.

Dans un mas délabré, en provence. Un après-midi de torpeur.
En passant devant la chambre, il aperçoit sa femme qui se rafraîchit après la sieste. Un broc d'eau tiède mais plus fraîche que l'air qui stagne et s'étend en étole sur ses épaules, couvre ses hanches.
Aucune impudeur dans cette nudité offerte.
Il la redécouvre dans cet instant. Il retrouve sa spontanéité, son oeil clair. Et il capte chaque sursaut sur son épiderme, chaque frisson érectile, chaque repli emprisonnant la sueur, toutes ses odeurs, du sel au sucre. Il impressionne la pellicule avec une émotion furtive.

J'aime énormément cette photographie et son histoire.
J'aime encore plus la comprendre mieux maintenant.
Et je me tais.

lundi 5 juillet 2010

léthargie en ut majeur


Dimanche, toujours pas sommeil. Il fait chaud.
Des vagues moites succèdent aux rares courants d'air. Le temps est à l'orage.
Pourtant, toutes les fenêtres sont ouvertes. Les portes sont bloquées par des cales pour m'éviter de sursauter. Un bouquet d'Arum noirs et de freesia blancs sur la table basse, un autre de feuillages, cassis, buis et philodendron sur la cheminée, et un petit avec juste un arum et un freesia à côté, voici les seules touches de fraîcheurs dans l'appartement.
Je me dissous dans cette moiteur.

Est-il raisonnable de prendre une troisième douche?
Je me contente d'eau froide sur les poignets et sur les pieds.
Paris serait parfaite avec des alysées. Mais la Seine manque de sel, les platanes de noix, le ciel d'Ortolans, les ballons des zincs de lime, et les au revoir parisiens de "à la grace de dieu".

Donnez moi un hamac et un peu de vent, et je dors ... ou me réveille complètement!
J'hésite à sortir faire un tour dans les rues.
Il doit faire meilleur dehors.
1 heure passée. Ce ne serait pas raisonnable. Mais il faudrait surtout que je remette mes chaussures, un autre Tshirt , un coup de peigne dans le nimportenawak qui choucroute sur mon minois miné.
Je renonce.

Alors je reste là, fenêtres ouvertes, de vagues feuilletons américains en fonds sonore et unique source lumineuse avec l'écran du portable.
Ces soirs d'été sont étonnants.
Les immeubles parisiens, fenêtres béantes ou entre ouvertes, reprennent un peu d'humanité.
Un peu trop.

Une table qui se débarasse, des bruits d'assiettes qui s'entre choquent, des conversations qui s'animent et meurent, des enfants qui pleurent, des musiques qui se superposent, des amis qui se quittent, des couples qui se retrouvent et s'oublient... et oublient que les fenêtres sont ouvertes.
Il semble que la chaleur ait un effet détonnant sur les cordes vocales de l'amante épisodique du ténébreux du 2e droite.
Cela fait plusieurs fois que j'hésite à leur laisser une bouteille de champagne sur leur paillasson, pour honorer le dieu des décibels orgasmiques, et calmer mes réveils en sursauts au hurlement marquant la première joute de ce cher voisin.
Voici de ces surprises des étés et des fenêtres ouvertes.
On se dit à peine bonjour quand on se croise dans le hell, mais on partage nos ébats, la bande sonore tout au moins.
(nb: je garde la faute de frappe du hall - pour ce joli lapsus remarqué par EL)
Pour autant, cela ne me le rend pas plus sympathique le grand ténébreux du 2e droite.
Il ne faudrait pas que par sa faute je sois insomniaque confirmée et en plus très indiscrète!
Demain va être une longue journée.
Je promets mon regard le plus noir au premier (ou première) qui fera une remarque sur l'ombre de mes cernes, mes baillements étouffés, mon manque de peps.
Et demain est justement une journée à qui je dois d'être vive, alerte et aiguisée!
L'avantage quand on n'a pas le choix, c'est que l'on économise l'énergie des prises de tête, tergiversations, et autres cogitations solitaires et stériles.
Donc demain je dois et je serai vive, alerte et aiguisée.

It's time to sleep,
it's time to slip, to tomorrow
perhaps !

Alors je repense au film quand Harry rencontre Sally. Je repense à mes déjeuners hivernaux chez Katz (silencieux).
Je me souviens de la tête de Meg Ryan sans silicone ni botox.
Je pense à tout cela et espère que mon voisin ne pense à rien, juste à dormir, et préserver ses tympans d'un destin funeste que je lui prédis très proche.
J'enfile un Tshirt, un jean et des ballerines.
Je sors prendre l'air, attraper un coup de lune, entrer dans demain.
Et au retour, certainement je dormirai.

See You!

dimanche 27 juin 2010

L'instant juste


Dimanche, fin de journée.
La chaleur est présente, enfin. A peine quelques traits de vent qui se faufilent.
La soirée promet une nuit pesante. Mais la nuit est encore loin.
Je remets en place mes moments de ces deux derniers jours.

Le week-end a commencé vendredi soir avec Cyrano, à la comédie française. Après Ubu Roi la semaine dernière, j'apprécie à nouveau cette jubilation de troupe, ce soin dans la mise en scène, le temps consacré aux détails, les jeux jusque dans les mouvements des mains, la souplesse des poignets perceptible du dernier balcon. Les chants également. La tradition des théâtres, des divertissements. Une institution vénérable, qui arrive tout de même à faire des pieds de nez malgré l'amidon des pourpoints.
Une soirée de péninsule, de pic.
Une soirée d'excès et de retenues. Les cadets de gascogne, les théâtreux grimés à l'outrage, l'opportunisme de Christian, l'exigeance égotiste de Roxanne, le renoncement frondeur et magistral de Cyrano, et l'ignorance de tous, nonnes, amis, guerriers de noblesse, maître queue cocu.
Une soirée splendide qui se continue au café de Nemours, comme elle y avait débuté d'ailleurs. Comme j'aime à m'y attarder. Le temps est maintenant aux discussions. La nuit est douce, à peine entamée. Balade pour rentrer.
Paris est un peu moite, splendide, enfin estivale.

Je fais don de la matinée de samedi à mon sommeil en retard.
La journée m'offre encore de beaux moments, de menus plaisirs. Préparer des cadeaux. Prendre l'air. Prendre aussi quelques photos. Etirer le temps, le révéler, s'y exposer. Un dîner entre amies. La terrasse éphémère devant le théâtre de l'Odéon.
Il fait vraiment chaud.
Les nuits sont plus longues que le sommeil. Mes sorties tardives n'y changent rien.
La fraîcheur et l'insomnie sont deux vieilles ennemies qui s'évitent. Quand la fraîcheur est là l'insomnie s'échappe. Quand la fraîcheur est absente, par contre, l'insomnie prend ses aises. Ce samedi, l'insomnie se pavane et se vautre, s'impose sans être invitée.

Dimanche.
Mouffetard a ses airs de galas, de ceux vantés par tous les tour-operators qui nous déversent leurs cars de touristes: "un marché typique, des musiciens, des danseurs qui valsent, javatent, tangotent, le tout tellement photogénique, qui vous laissera des souvenirs exceptionnels, authentiques... et tout le blabla baratineur qui allèche le touriste, émeut le photographe occasionnel et séduit les couples de touristes en mal de moments "so nice" immortalisables dans la plus romantique ville du monde... et ce, même ntre deux étales de poissons, une pyramide de poivrons et une bleuglante qui entonne "la vie en rose" avec une conviction qui n'arrive pas à gommer ses fausses notes.
Je me faufile.
Quelques courses.
La matinée est à peine amorcée. Il fait déjà lourd.
J'ai rendez-vous vers 13 heures.
Je me hâte pour rester décemment en retard.
J'y arrive tout juste.
L'anniversaire d'un ami magnifique. Autour de lui, de belles personnes.
Un déjeuner et un après-midi de ceux qui arrètent le temps, et laissent suspendus sur les lèvres les sourires qu'ils y ont fait naître.
J'ai de la chance. Je ne m'habitue pas.

Retour at home à l'heure où la lumière est rasante.

Je fais le tri de quelques photos en visionnant du coin de l'oeil un DVD. Peau d'Ane. Un achat spontané fait sur un sourire, un brin nostalgique. Le film a gardé toute sa magie. La fée des Lilas toute sa féminité. Deneuve sa beauté et sa photogénie évidente. Seyrig son intelligence et son charme modulé. Ce casting est superbe. Les subtilités de Demy restent intactes. Aucune mièvrerie. Un soupçon de kitch pour ajouter à l'illusion, pour éviter un réalisme banal qui limiterait l'imagination.

La délicatesse, la poésie, l'humour sont autant d'attentions. Aucune lourdeur dans ces invitations.
Je laisse de côté mes photos à trier.
J'ajuste le coussin sous ma nuque. M'allonge sur le cuir encore frais du canapé. Je me laisse embarquer par le film.
Une parenthèse s'ouvre. Se referme sur le générique de fin. Je me re-trouve posée sur le canapé, reposée, re-posée. J'étais loin.
L'ordinateur est en veille. Le tri des photos en plan.
"Enter".
Une photo reprend le plein écran.
Une série récente sur un bouquet de pivoines. Série faite un soir de cette semaine, quand, rentrant tardivement ce bouquet m'a arrêté. Ce devait être mercredi, certanement, après le début de cette vague de châleur.

Les pivoines étaient toutes à maturité.
A ce moment précis, ce moment juste avant de se disloquer. Epanouies au point ultime. Les pétales maintenant immenses encore splendides de fermeté, toujours délicates, de ces coloris si intenses au coeur s'évaporant en transparence à leurs bords, fragiles maintenant au point qu'un tremblement les fait tomber.

Je suis restée un moment à contempler ce bouquet, à apprécier ce moment précis. Cet annoncement de la fin.
J'ai tourné autour en prenant soin de ne pas troubler l'air, de ne pas heurter la table.
J'ai attrapé mon appareil, prudemment. Tenter de capturer cet instant. Attendre.

Puis, j'ai cessé d'attendre pour ne pas avoir à retrouver demain matin un tapis de pétales qui se serait étendu à la faveur de mon sommeil.
Alors, doucement... Comme on souffle sur des fleurs de pissenlits ou comme on déchire des lettres, j'ai donné un petit coup sur la table. Puis un autre. Et encore. Regardant les pétales tomber. Laissant le bouquet disparaître au rythme de ces petits tremblements.
La réalité est souvent plus présente quand on en force la fin.
Une nouvelle fois, aux détours de ces pétales, ce passage d'Alice qui s'invite dans mon esprit. Un passage qui me fascine de justesse: "et elle essaya d'imaginer à quoi ressemble la flamme d'une bougie une fois que la bougie est éteinte".
Les paraboles sont infinies, ces bougies sont innombrables, aussi personnelles que les imaginations qui les portent, que les souffles qui les mouchent.
Alors... de la fenêtre, un trait de vent presque frais... enfin !








lundi 21 juin 2010

ut majeur


Ce soir fête de la musique, le 21 juin.
Faîtes du bruit.
Laissez mes souvenirs venir.
Fichez moi la paix... en même temps...
Il semble que ce soit l'été.
J'ai froid pourtant.
Ma peau reste étonnamment blanche. Mes épaules sont encore couvertes. La légèreté de l'air m'échappe comme des billes de mercure, comme des caïmans devant un inspecteur du fisc, un souffle de fleurs d'oranger devant Rocco Zzzz, un soupir voilé devant un asthmatique, mes confidences sur le bord de mes lèvres.
Je suis un tantinet réfrigérée. J'avoue du bout des cernes un peu de fatigue.
Je ne m'y résous pas. Le blush attendra demain.
La musique reste savoureuse, à goûter. Le sens premier est le plus juste.

Ce soir c'est the fête.
Les cotillons seraient de trop.
Il ne faudrait pas exagérer. Les falbalas et blablas, je les ai laissés hier, derrière moi.
Avec mes faiblesses et mes absences. De celles qui autorisent un peu de décence.
Démaquillage approximatif. Tenue très décontractée, limite autorisée pour croiser les voisins dans l'escalier, un fonds d'un très bon wisky dans un verre en cristal, sans glace of course... Sur ma table, un bouquet de pivoines qui s'étire, magistral.

Mes pensées sont un peu lourdes ce soir.
Je fais tourner le petit fonds de Talisker dans ce ci joli verre qui tinte.
Il n'est pas certain que mes levres y goutent.
Je retarde le moment de le déguster.
That's time!

Chears,
Enjoy the music,
Have fun,
just, Enjoy fun,
and ... j'oublais,
le rythme et le vacarme pourtant musical de NY me manquent un peu .... mais ce n'est pas si mal la java, indeed!

dimanche 20 juin 2010

insomnie diurne


Voici un exercice qui me trotte dans la tête comme une ritournelle depuis quelques temps.
C'est à la manière de « selle de ch'val,ch'val de course, course à pied, pied a terre, terre de feu »…
Un exercice amusant, presque autant que des photos offertes en kit. Il s'agit de laisser libre cours aux associations d’idées...
Idée, hédoniste, Istambul, boule de bal, balle à blanc, blanc d'espagne, agneau de lait, laiterie, idées …

Donc, sur le principe on commence par un mot. J'ai choisis "Elégant".
On s'égare, et on essaie de revenir à ce mot. Comme un domino !

Elégant,
enchanter, télépathe, attirer, rai de lune, lune claire, aire de jeux, jeux de quilles, quilles en bois, bois de rose, rose des vents, vent debout, bout en train, reins tendus,
dulciné, nez busqué, quai de gare, garde fou, fou de bassan, embrasser, serrer fort, fort en thèmes, aimons-nous, outre passe, assassin, seins (saints!) de glace, lacérer, raie manga, galipettes, pétaudière, errements, entrelacs, à genou, outrageant, entre-nous, nouveauté, thé de chine, ineffable, fabuleux, heureux qui, qui a su, supplanter, tes envies, viscéral, haletant, angle mort, mort de rire, ris de moi, moi de toi, twilight zone, honni soi, soie sauvage, âge d'or, oriflamme, amaranthe, hantons nous, outrageux, jeux de mains, maintes fois, foisonner, éluder, élégance….

Voila... Moi cela m'amuse !

Il en est de certains moments, comme des mots, qui ne trouvent de sens que par leurs enchaînements.
Il en est de certaines histoires comme de ces moments, qui ne trouvent de sens que par leurs atermoiements.
Et puis, finalement, résolument, choisir d'être égoïste par respect pour des plaisirs qui se partagent.
Arrêter de se prendre la tête.
Juste profiter de l’air qui devient léger, du froid qui ne veut pas laisser sa place à l’été, de l’énergie communicative des soirées au théâtre, aux spectacles, ou en terrasses.
Oui, je sais, je suis une reptilienne contrariée... Fonctionner à l'instinct et laisser les réflexions m'envahirent, même nulles, même inutiles. Mais je peux envisager de me soigner!


Retour sur ce week-end: séquence "tribulations d'une parisenne à Paris".

Vendredi, une soirée à la comédie française : Ubu roi. Un délire un peu acide, juste dérangeant, euphorisant. La chanson de l’écervelage est une pépite.
Le jeu des acteurs, la mise en scène sont parfaits, de cette perfection faite de talents et de temps, de peaufinage et d’inspirations.
Une forme d'intelligence communicative, qui permet de succomber à la facilité de rire des horreurs.

Je retournerai dans la "grande maison" la semaine prochaine pour Cyrano. Pour le plaisir des mots, du jeu, des beaux nez et des non-dits.
Ce vendredi, après cet Ubu, une fin de soirée en douceurs. En tête à tête amical.
Le lendemain, les petites corvées habituelles sans lesquelles les samedis ne seraient qu’un jour de repos comme les autres.
S'accorder du temps pour moi.
Coiffeur et achat d'une paire de chaussures. Deux heures "exclusives" qui valent tripette (good trip ? bad trip ?).
Puis, a suivi une soirée de crémaillère, à papoter, danser, rire. Manger, boire et s'amuser. Le plaisir partagé. Etre spontanés.
Rentrer tôt, le matin, ne pas être fatiguée.
Attendre que le sommeil vienne, s’endormir finalement largement après l’aube.
Se réveiller. Presque fraîche... enfin presque (notion de fraîcheur à corriger des variations des quadra-syndromes).

Se dire que ces moments-là valent le coup. Même avec des poches sous les yeux.
Rebondir sur d’autres moments.
Laisser mes pensées faire du trampoline, des pirouettes.
Rester en légèreté, gouter l'apesanteur.

Je ne me laisse même pas polluer par l’interview débilitante de Riberi qui, à grand renfort de fautes de français, de « honnêtement », et de « moi je m’excuse », essaie de donner un fonds dramaturgique aux péripéties de vestiaire de ces tapeurs de ballons mal embouchés. Il utilise un temps d’antenne, dont il ne connaît même pas la valeur, pour nous gaver de leurs états d’âmes de porteurs de short, shooters occasionnels, et jouisseurs toujours bloqués en position pré-pubère.
Ces tribulations de footeux n’arrivent pas à me mazouter l’esprit. Mes pensées volent toujours.
Je m’amuse à me cuisiner un déjeuner (goûter ?) soigné, un peu recherché.
Un opéra en fonds sonore.
Le vol de mes pensées prend de l’ampleur. L’esprit plane.
La fatigue vient alourdir ses ailes. Je me refuse à dormir.
Il sera bien temps.
Plus tard.

lundi 14 juin 2010

voleuse


Ce serait l'histoire d'un moment volé, à deux amies, vieillissantes, qui me sont inconnues.

Ce serait l'histoire d'un après midi qu'elles auraient passé dans l'air presque frais d'une alcôve du pont neuf.

Elles étaient là, jouant aux cartes, avec des jeux usés, peluchants sur les bords, un peu collants.

Elles étaient là, chapeautées sentant la poudre de riz et la lavande.

Elles étaient là, m'ignorant majestueusement, là. Concentrées sur l'essentiel, cette partie de cartes, le pli à venir, autant dire rien.

Je suis passée rapidement. Déclenchant la photographie en passant. Sans cadrer. Au hasard.
Le hasard m' a servi.
Elles étaient si sereines, que je m'en serais voulue de les cadrer avec insistance, sans respect.

Je leur ai volé ce moment, c'est indéniable. Mais je l'ai chapardé par goût, sans calcul.
Instantané. Instant aimé.
Cette photo que je regarde ce soir tranquillement, de retour chez moi. Cette photo me renvoie à une foultitude de moments.
De ces instants entre parenthèse, comme isolés.
Des instants suspendus comme les confidences entre deux atouts, comme cette morgue à ignorer les passants, le bruit. Des instants qui s'étirent comme ces ombres portées sur leurs visages par des chapeaux un peu usés.

Vol par affection, petite effraction.
J'aurais aimé savoir leur offrir des fleurs sans être ridicule ou intrusive, le marché aux fleurs était à deux pas.
J'aurais aimé prendre un thé ou un verre de blanc avec elles sur une des terrasses voisines.
J'aurais aimé avoir un peu plus de panache dans mon vol d'image.
Avec un peu de chance, elles seront là à nouveau dimanche prochain, dans leur alcôve du pont neuf, si le temps est lourd, s'il fait meilleur dehors, si la partie de cartes n'est pas finie.

Je délaisserai alors d'autres loisirs pour les retrouver.
Sauf, si ... mais, ce serait un autre jeu de cartes plein d'atouts, moins public, un mélange improbable entre "bataille", "patience", "réussite". Une autre parenthèse suspendue.
Il serait doux d'être détournée de cette balade au pont neuf.

dimanche 30 mai 2010

... pffff

Ce billet émerge au détour d'un moment de grand désarroi, d'ennui XXL, à demie affligée, mais néanmoins toute entière explosée de rire... ce billet émerge au milieu du visionnage de l'émission Zone Interdite.

Une de ces émissions spéciales d'avant les vacances.

Il ne s'agit pas de celle sur les ratés des liposucions, ni sur les secrets de photoshop, ni encore sur l'hygiène douteuse des bars et paillottes de la côte, ni même sur le côté très hype et têêêllement sympathique des campings.

Non, le sujet de ce soir est un autre de ces marronniers, catégorie "drames urbains": l'amour à tout prix.

Alors dans l'ordre, entre 2 zappings, j'ai eu droit :
- aux clubs de rencontres entre gens du même rang car " il ne faudrait pas frayer avec des saumons de bas étages tout de même",
- suivi du chapitre spécial "les djeun's ne font pas peur", dédié aux nouveaux romantiques pré-pubères tellement crétins que s'en est attachant,
- et pour finir un bouquet final de fleurs d'oranger pour les "anti consuméristes" de la gaudriole, les économes des égarements, les asthmatiques des soupirs. Avec, on the top of the pièce montée, le chou à la crème de trop, même pas brûlée la crême: un chapitre amour "durable", obédience " je m'économise pour l'âme soeur".
C'est fait: je craque.

Heureusement, cette journée a été belle. Sinon, il y aurait de quoi douter du grand ordonnanceur!

C'était une belle fête des mères. Pas ma fête donc. Mais une journée dédiée à faire plaisir.
Choisir des cadeaux, préparer un repas soigné, papoter, se taire, prendre le temps, ensemble. Une journée comme je les aime.
La soirée est maintenant avancée. Dimanche s'estompe.
Alors, il me vient une idée de jeu, autour de mots, de jeu sur un mot.
Disséquer un mot. L'autopsier par syllabe. Le détourner gentiment.
Histoire de rendre à M6 l'hommage qu'il se doit, remercier pour ce grand moment de rire au 3e degré de belle qualité que m'a offert zone interdite: je prendrai le mot "Célibataire"

Ce jeu vous parait un peu flou?
Commençons!

: car c'est une évidence
éli: l'élu n'est pas là, l'élire ce sera l'hallu, le hola du houlala, la Ola (dear Boby Lapointe)
lib: une liberté à peine tronquée
liba: libation sans fin, habile en verlan
air: il semble que parfois certains étouffent, qui en couple, qui seuls, qui sait se tait
re: reprendre la ritournelle, à son gré, sans regrêt jamais
taire: shutt tout ne se dit pas!

voila pour ce nouveau jeu !

Si vous avez un mot à me proposer pour jouer avec... fell free...
Sinon, je pensais à "péridurale", "halogène" ou encore "merveilles".

A bientôt !

PS:
Le coup de soleil est passé, mais Mister Hopper est bien parti, easy rider trace la route plus loin encore. L'instinct et la liberté quand ils se conjuguent à l'intelligence. Dérangeant et pourtant. Les brûlures par le froid sont tout aussi sévères.

lundi 24 mai 2010

coup de soleil


Lundi, pentecôte, solidarité ...
Trêve de blabla,
je me contenterai d'une journée de chaleur et de soleil. La seconde de suite. Effet de ricochet incroyable volé à ces derniers jours un peu trop automnaux.
Presque minuit ce lundi, et j'ai cette impression si particulière que la journée garde ses dards.
Un coup de soleil.
Le premier de cette année.
Un peu de la journée qui empiète sur le soir. Le soleil qui reste à fleur de peau. Le sang qui ne songe pas à dormir.
La peau à vif.
Cette petite douleur si bien portée, de circonstance.
Du plaisir à cette petite douleur? Y pensez-vous? Ce serait un peu moins "de mise", un peu moins correct, indeed.
Hier déjà le soleil m'avait mordillé un peu le cou. Une rougeur à peine sensible.
Tout juste un agacement sans autre sensation que celle de garder l'empreinte blanche de mes doigts sur ma peau. Empreinte vite estompée.

Ce soir je garde sur le cou et l'épaule un peu plus de cette journée.
Des flèches sous la peau. J'ai pris un coup de chaud.
Je n'avais pas envie de dormir tôt, c'est une aubaine!
J'entretiens presque "inconsciemment" cette sensation de brûlure.
Un prétexte de plus, tout trouvé, pour laisser cette soirée s'étioler jusqu'aux extremes. Pousser le temps, prendre le temps de conclure ce long week-end.
Cette soirée clôt un après-midi en partie passé à lire sur les pelouses, bien entendu interdites, du jardin de l'école polytechnique.
Un jardin confidentiel. Caché, ou presque.
Ma lecture?
Un livre de poche que j'ai lu en un peu plus d'une heure. "L'open space m'a tuer". Une récolte de ma virée à la librairie Eyrolles samedi.
Drôle de bouquin, surtout effrayant. Je pourrais me reconnaître à chaque page. Vraiment. Flippant comme dirait mister V!
En complément de cette lecture facile, Le monde du Week End, et un autre ouvrage, Le prince de Machiavel. Une nouvelle relecture. Encore, et encore.
Allongée sur ces pelouses prohibées, les pieds à l'air, les lunettes installées sur le nez.
Il fait chaud.
Le BlackBerry vibre de temps en temps. Je l'ignore.
La peau se tend, se lifte sous l'effet de la sueur qui s'évapore. Un goût salé, assez particulier, supplante les dernières traces de mon parfum.
Qu'il est bon d'être terrassée de chaleur et de lumière.
Je suis presque enivrée.
Je change de positions.
Les pieds à plat sur cette pelouse si bien entretenue, drue et dure. Les lunettes maintenant posées sur mon ventre. Mon livre laissé de côté. les bras étendus au dessus de ma tête. Allongée sur le dos, tout du long.
J'écoute.
Un couple, un homme, une femme, la trentaine, ils sont amis. Ils parlent à côté, des platitudes, gentillettes, agréables. Barbantes. Je les regarde à travers mes cils qui ont du mal à affronter la lumière, encore plus que leur banalité. Ils sont charmants, de bon "commerce". Ils boivent une bière. Elle est forcément tiède. Faute de goût que je ne leur pardonne pas. Je les zappe.
Plus loin, des gamins qui jouent au foot.
Ils ont deux ballons. Je ne les vois pas. Juste leurs voix pour me guider. Ils sont nombreux, mais il n'y a finalement que deux voix qui sortent du lot; 1 leader par ballon. Je me force à garder les yeux fermés.
Ces gamins sont drôles, gouailleurs.
Des traits de lumière frais, vibrants, qui ressortent dans cette clarté pesante et blanche de milieu d'après-midi.
Je les écoute. Je somnole un peu certainement.
Plus tard, une fillette en maillot de bain qui saute à pieds joints dans les flaques de la fontaine presque asséchée. Elle est amusante. Amusante et seule. Seule à chercher des jeux, des idioties, seule à en rire. Mais elle ne rit pas. Elle saute juste à pieds joints dans les flaques, et tourne autour de ce bassin, sans fin, sans autre envie que celle de dépenser de l'énergie.
Moi, je suis assommée de chaleur et de fatigue aussi. Il faudrait que je me repose.
Je redescends vers chez moi, traversant des groupes et des groupes de touristes qui engorgent la rue Mouffetard.
Je passe par le supermarché faire le plein de softs et de glaces. Je retrouve mes pénates. Fraîches. Accueillantes.
Home sweet home
Une douche plus tard.
Il est là. Il se réveille.
Là pour plusieurs jours.
Mieux qu'un singe sur mon dos, plus lourd qu'un papillon sur mon épaule.
Il est là qui s'est invité à m'accompagner la semaine prochaine à Edinburgh à regarder les mollets des garçons, juste là, sous l'ourlet de leur kilt, à parfaire sa connaissance en gestion financère.
Il est là qui se tortille et qui vibre.
Il est là.
C'est mon premier coup de soleil de l'année.
Une morsure bienveillante, très peu esthétique.
Alors que j'écris ce billet. La peau reste fragile.
Je suis d'un oeil au téléviseur, un reportage sur Dennis Hopper. Un esthète, extremiste, affleurant, inassouvi.
J'ai cru entendre il y a peu qu'il était malade. Mourant. Cette émission est peut être programmée du fait de son décès.
Ma peau est un peu calmée, mes yeux brûlent maintenant.

Les soleils sont si rares, que leurs traces en sont précieuses, toujours.

vendredi 14 mai 2010

coeurs croisés chez albion

Un billet juste pour saluer une reine, une amie.

Saviez-vous que ce samedi, le 15, Londres sera arpentée par 15000 marcheuses?
Saviez-vous que ce samedi, le 15, Londres accueillera une vague de générosité du bonnet A au bonnet Hors cote?
Saviez vous que ce samedi, le 15, Londres enveloppera de son brouillard une marche nocturne, charity pour le cancer du sein?
Saviez-vous que ce samedi, le 15, je serai définitivement admirative?
Saviez-vous que Playtex n'était pas du tout une marque ringarde?

Il y a quelques petites années en temps calendaire, presque un siècle en temps d'émotions, une éternité en temps d'anxiété. Once upon a time ...

Il y a donc quelques temps je traversais ces moments suspendus, de 2 semaines en 3 semaines, de nuits agitées en nuits blanches, entre une échographie, une biopsie, de pronostics en diagnostics, une autre visite, puis encore une visite.

Le pansement de la biopsie toujours en place, les cernes un peu plus sombres, j'écoutais les résultats. Un sourire finalement se dessinait en apprenant, défiant tous les paris, que cela était bénin. Rien. Nada. Partie remise.

Les années de fumeuse, les années de stress, les excès et la génétique, tous mes mauvais génies étaient recalés, out, sur la touche.
Je m'étais résolue à ce que l'inéluctable apose ses conditions, ses limites à ma vitalité, à mes espérances les plus cachées.
Le boulet ne m'avait que frôlé. Une ombre juste balayée sur ma poitrine.

Je savourais cette chance. Je mesurais ce que j'avais presque admis, alors qu'attendant les résultats, j'envisageais une maladie qui me semblait déjà très familière.
J'avais accepté de batailler, de tout faire pour rester encore là.
J'avais aussi compris que je pouvais capituler, je ne l'admettais pas encore.
Je l'ai admis maintenant.

Pas de guerre pour moi. Pas cette fois. Mais j'avais pris de cette bataille avortée, la violence et les cris.
Pour la "bella dona", quasi dans le même temps, à quelques jours d'intervalle, les nouvelles étaient plus sombres, terriblement rudes.

Elle subissait les mêmes examens, le même protocole implacable.
Mais pour elle, les diagnostics inaudiles, les chirurgies radicales, pas le temps de se retourner, le temps de rien.
Face à cette maladie qui touche les femmes dans leurs attraits les plus fantasmatiques, face au cancer du sein, elles se révèlent souvent dans tout le courage et la force que les mythes ont dépeints.

Il faut savoir sublimer la vie, ses enfants, ses amours, pour s'oublier dans son corps, oublier sa peur de ne plus se retrouver.
Il faut plus que de l'amour pour avoir confiance, prendre le parti de l'optimisme lucide.
Passer le choc des annonces craintes. Passer ce choc pour entendre, puis comprendre, alors envisager la suite: reconstruire cela veut dire détruire en premier. Ne voir que la guérision derrière l'ablation.

Il faut un courage de lionne, il faut la force d'un frôlement d'ailes, il faut la certitude d'une roche.
Il faut être au plus vrai. Rester juste. Ne prendre que le recul nécessaire. Jamais plus.

La "bella dona" est pour moi un exemple de courage et de pudeur, une générosité extrême. Une source d'humilité et de forces.

Voila ce qui fait que, bien qu'à Paris, je serai de coeur et d'âme dans ces rues de Londres que j'ai oubliées, posant des ailes aux chevilles des marcheuses, guettant les "seinglées de la lune", criant des encouragements, gonflant de fierté de me reconnaître en elles une poitrine encore préservée, en sursis.

Donc ce week-end c'est la Moon Walk, organisée par playtex à Londres, pour la recherche contre le cancer du sein, pour la prévention, pour en parler, pour y penser.
Je n'y suis pas cette année, pas directement, mais sur l'épaule d'une "belle personne" que j'ai la chance d'avoir croisé sur ma route.

Gonflez votre poitrine mes amies,
Flattez les décolletés mes très chers,
Restons rieurs, lucides,
Restons légers,
Et fréquentons ces infréquentables médecins qui démembrent parfois nos certitudes béates, mais nous aident à éviter les gouffres

dimanche 2 mai 2010

jeu blanc

Une soirée de plus. Un dimanche de plus. Une fin de semaine de plus. Un premier mai de plus...
Qu'y ai-je trouvé de plus?
Ce n'était pas le moment, mais il a fallu que le temps se gâtât justement ce week-end-ci.
Des averses qui s'invitent, des éclaircies qui s'excusent. Le temps lui aussi ne ressemble à rien aujourd'hui. Je le remercie de me faire cette politesse. Aujourd'hui, je m'évite devant les miroirs.
Donc me voici à la fin d'un Week-end sans intérêt.
Au détour d'une journée gâchée, qui m'éclate à la face, comme un reproche, ma promesse non tenue de ne jamais perdre mon temps.
Je m'étais promis pourtant.


Au détour de cette journée, prise du remords de n'y avoir gouté aucun plaisir, je vous livre une confidence.
J'avoue que, plus que Buster Keaton, plus que le duo Hepburn/ Tracy, plus que l'Os à moelle, plus que le Pr Rollin, plus que ces maîtres de l'absurde...

J'avoue en cas de crise de moral, en cas de manque aigu de vitalité, en cas de reproche à moi même d'avoir gâcher du temps, j'avoue avoir une botte secrète.
Un remède violent.
Une médecine qui ne peut que redonner le sourire.
Le sommet incontesté pour moi de la kitchitude.
Le must de ce qui se fait de décalé, inutile, narcissique. Le must de ce qui peut arriver à occuper l'espace avec rien. Le must de ce qui peut combler la crise d'angoisse la plus abyssale.
Je vous avoue ce dont je peux abuser pour retrouver le sourire, à moins que cela de m'achève un jour.
Je vous avoue que le nec plus ultra reste ...
Vous ne trouverez pas, sauf si vous faites partie du club très select des avertis.
Donc, mieux que le prozac, mieux qu'un massage, plus réconfortant qu'un carré de Sao Tome, plus doux que sa peau sous l'oreille, plus souple qu'un graves blanc, plus complexe qu'un meursault.
Donc, mieux que cela, je vous recommande en cas de spleen, de vous connecter à You Tube.
Prenez votre souffle.
Choisissez de visionner sans le son n'importe quelle chanson d'Hervé Vilard (mais "méditerranéenne" est un grand moment).
Je précise: enlever le son est essentiel!

Maintenant, il est temps que je trouve à sauver cette journée.
Les averses ont cessé. La nuit s'annonce. Autant sortir.
Il n'est pas exclu qu'au coin des rues je retrouve l'entrain, l'inspiration and some fun!

lundi 26 avril 2010

A la manière de ...

J'étais aux arènes de Lutèce, côté ombre.

Mon carnet de notes au fonds du sac, entre un paquet de mouchoirs en papier, plusieurs stylos, un portefeuille, un appareil photo, le monde, un bouquin de nouvelles, un étui de lunettes, un vaporisateur, et diverses autres choses.
J'étais aux arènes, sans toros ni musique, très loin de mes plazas du sud ouest.
Loin du sable, de ces combats et stratégies qui n'ont d'autres recours que le courage, l'intelligence et la force.

J'étais aux arènes de Lutèce, tranquille.

Il fait chaud par moments. Le temps est un peu couvert. Parfois les lumières d'été pointent sous un printemps qui s'affirme.
Je fredonne dans ma tête. A river with no return.
Rien ne contrarie mon air dans ma tête. Ni le bruit sourd des ballons de foot sur les murs. Ni le choc métallique des boules de pétanque. Ni le tremblement effarant des shoots sur les grillages.
Hormis ce tissage de bruits, tout est calme. Trop.

Alors, dans cet environnement paisible, une idée me vient.
"Moon river" succède à " A river with no return".
Dans mes fredonnements muets, un enchaînement de chansons qui a tout du cadavre exquis.

Et puisqu'il s'agit de cadavres exquis, me vient l'idée de noter dans mon carnet, celui-là même qui est au fonds du sac, de noter un chapitre d'un journal intime qui ne serait pas le mien.
Une sorte de "à la manière de....".

Et tant qu'à ce que mon imagination soit le nègre imposé d'un autre, autant que ce nègre soit au service d'une blonde.
Alors ne vous affolez pas tout à fait Les pensées, les mots qui vont suivre sont de mes doigts, certes, mais ne m'appartiennent pas vraiment.
Et tant qu'à choisir une blonde pour faire le nègre, autant que ce soit la plus solaire de toutes, la plus sombre de toutes.
Voila ce vers quoi m'a conduit de chantonner "no return, no return, no return..."

J'ouvre les guillemets.



Cet après-midi est calme. Pourtant je ne le suis pas.
Je bourdonne. Il faudrait que je trouve ce qui provoque en moi ces accès de doutes, de colères. Ce qui nourrit cette énergie que je ne canalise pas et qui me ronge. Ces accès sont difficiles à surmonter. Il n'est question ni d'angoisse, ni de tristesse. Juste un sentiment diffus, une aspiration irrépressible vers le vide, vers la nouveauté, vers une forme de danger quel qu'il soit.

Il me faudra arriver à utiliser ce sentiment. Ces moments doivent pouvoir me servir. Ils ne sont pas là pour rien, pas là pour me blesser uniquement. Je dois apprendre à les utiliser. Ils doivent m'aider à nourrir mes rôles au lieu de me ronger.
Ceci m'évitera de contourner ces sentiments comme on essaie d'évincer un danger pourtant imminent.
Mais, à contourner un feu, on se brûle tout autant. Plus lentement certes, mais tout aussi surement.

J'ai commencé très jeune par des photos. Elles ne m'ont pas permis de voir ce qui manquait. Mes manques n'impressionnent pas la pellicule tout au contraire Mes failles font ma photogénie exceptionnelle. Mon image est parfaite, si loin de ce que je suis. Ma détresse se dilue sous les spotlights. Me voir sur écran ou sur photo ne m'apprend rien de moi.

Je n'ai rien trouvé qui me permette de combler ce vide, ce vertige qui pave mes pas.
Ni la nourriture, ni l'alcool, ni les anti dépresseurs, pas même le sexe.
On me juge mal.
On me dit boulimique, imbibée de champagne, droguée, nymphomane.
Je ne suis rien de cela.
Tout cela me dégouterait si je n'y trouvais un peu de répit.
Je ne suis pas stupide. Je sais que rien de ce qui me soulage n'est la solution. C'est par moi et de moi que je dois combler ce gouffre, nourrir cette énergie néfaste, la repaître pour qu'elle se calme à nouveau.
J'aimerai l'apprivoiser aussi facilement que je le fais avec Joe, Arthur, Francky, John, et d'autres.
Je vais encore un temps jouer de mon image comme si c'était moi. Je pourrai encore, un peu, donner le change, outrer le masque.
C'est si facile.
Je vais encore jouer ce jeu. Il est plaisant, plus agréable que de m'affronter, moi-même.
Il est rassurant comme un filet sous les trapézistes, un garde-fou en bronze forgé, un air bag en soie.
Mon masque est exceptionnellement photogénique.

Un nuage de poudre de riz sur une plaie.
De l'eye liner comme deux berges sur des yeux qui dérivent de plus en plus visiblement.

Cet état de dérive, cette danse au bord des falaises, me sont familiers depuis très longtemps. Depuis toujours.
Depuis mes élans sans échos dans une enfance solitaire. Depuis ces années d'adolescence brouillées par des besoins d'affection et de confiance sans mesure, brouillées par un corps et une liberté qui créaient plus de désirs qu'ils n'avaient d'attentes de ma part.
Cet état de dérive m'accompagne depuis longtemps, et me précède aussi. Il nourrit mes réflexions et mes doutes.
Il a muri avec moi, tout comme il a grandi. Mais, à ma différence, il est resté le même, il ne s'est pas travesti. Intègre, il alimente ma quête d'absolu, de perfection, de sublime. Il reste mon repère le plus personnel.

Il semblerait que je sois une icône, un mythe.
Je ne suis qu'un vide, une abîme, abimée.
Je ne me construis que par mon frottement, par ma soumission à mes contraires.
Je me considère comme une "rien", et je m'impose: la perfection de l'image du père avec Clark Gable, celle du mari possessif et protecteur avec di Maggio, celle du souffre avec Sinatra, celle du pouvoir avec JFK. Celle de l'intelligence avec Miller, celle du mentor avec Strasberg, celle de ma vacuité avec mes amants de passage, anonymes, nombreux.
Je construis ma place parmi les autres à force de retards, de caprices, grace à leurs réactions tranchées, passionnées, révoltées, si possible violentes.

Je provoque ces réactions.
Je les maîtrise avec science, avec une intelligence extrême, un instinct rare.
Je façonne ces reflets de moi-même avec le même soin, la même concentration que celle que je déploie pour me coiffer, me maquiller, contrôler chaque onde de ma démarche, chaque mouvement de cils, chaque ingénuité de mon regard, chaque reflets de lumière sur mes épaules.
Une boule de controle encapsulant un vide qui se creuse toujours et encore.
Un vide aux parois de sable.

Je suis fragile. Je ne suis pas bête.
Je suis pour beaucoup la blonde qui passe en tanguant. Mais ils oublient que c'est moi qui aie pensé à casser un de mes talons pour forcer la démarche, pour flirter avec le ridicule, dans cette première apparition avec les marx brothers.
Ils oublient que je suis moi même mon propre marionnettiste.
Ils oublient. Dans leur ignorance, ils pensent savoir.

Alors, j'essaie d'oublier que je sais que ma tentation de maîtrise m'accompagnera jusqu'au bout de ma route.
Jusqu'au dernier cachet. La dernière gorgée pour les avaler. La dernière larme.
Je sais que je me soumettrai une fois de plus, une fois de trop, à leurs désirs. Je leur ferai la politesse de m'éclipser.

Alors, aussi surement que ceux que je voulais m'aimer m'oublieront. Ceux qui m'aimaient feront de leurs souvenirs le sens de la vie que j'aurai râtée pour moi-même.

... Voila, je ferme les guillemets sur ce billet "à la manière de...".

Toute ressemblance etc etc etc.

Je ne peux que vous conseiller Blonde de Oates, et rigoureusement toutes les photos de Marylin. Sur ce, je vais troquer Dzongkha contre chanel numéro 5 et aller me reposer en chantonnant no return.

samedi 24 avril 2010

Les moiteurs de mon front blème


Un verre de campari, noyé de glaces. Un bouquet de tulipes et d'hortensias. Un sms impromptu, un disque qui s'attarde, un air d'opéra: La Wally. Un ami trop occupé à retrouver sa meute, un après-midi au soleil. Il n'en faut pas plus pour que les idées qui trainaient saisissent ce moment, et se déploient à leur rythme.

Changement de registre, je passe de l'Opéra au jazz.

Il y a un an presque jour pour jour je revenais de ma parenthèse new yorkaise. Il y a un an presque jour pour jour je m'obligeais à renouer avec cette vie parisienne.

Il y a un an, nous dirons jour pour jour, je savais que je m'étais enfuie. Je l'assume toujours.

Il y a un an , nous dirons jour pour jour, je savais déjà que j'avais bénéficié d'une chance privilégiée, de rencontres précieuses. Y compris celle avec moi même.
Il y a un an, je revenais et me prenais une baffe magistrale.
Je change de registre et passe du jazz au tango.

Je me retrouvais ici même, heureuse d'être revenue, déçue de mes retrouvailles.
Je n'étais plus de Paris.
Cette ville ne me séduisait plus, ses habitants que choquaient, je n'avais plus mes marques, plus d'émotions, rien qui ne m'accroche. Le manque de respect général, l'agressivité latente, m'ont heurtée.
Je savais depuis longtemps être nostalgique parfois, mais là, je devais apprendre à composer avec des regrêts. Un apprentissage que je ne revendique pas, que je m'emploie à oublier.
Je me suis ingéniée à passer outre.
Je me suis employée à garder l'énergie et l'optimisme qui m'avaient portée loin de mes gouffres quand j'étais oversea.
J'ai fait ma vestale consciencieuse et j'ai entretenue la flamme.
Maintenant, je suis à nouveau parisienne, enfin un peu plus.

Demain, Dimanche, je me lèverai plus tôt.
J'irai au Luxembourg regarder de loin les Taï Chi, au ralenti, chorégraphiant lentement, dessinant avec science, dans le ciel du matin, ce que sera peut être cette journée et les suivantes.
Je m'arrêterai, suspendue.
Puis, je reprendrai mon chemin.
Il fera encore frais.
J'hésiterai et certainement choisirai de prendre un thé dans un café. Un peu de lait s'il vous plait.
Merci. Le serveur sera peu désagréable.
Je fuirai dans l'imagination, surfant sur les vies des passants que je regarderai à la sauvette, sur les bribes des conversations des tables d'à côté que je saisirai sans effort, sur les parfums qui viendront à ma rencontre.
Le thé sera trop chaud. Le lait froid.
Ce jour m'offrira une matinée à m'oublier. Une matinée à s'oublier et le savoir.
Ensuite je me ré-amarrerai au flow des parisiens.
Je leur chercherai des faux airs d'ailleurs. Je me dirai que ça ne le fait pas. Je me dirai que je le savais d'avance.
Alors, demain sortira de ma semie maîtrise et de mes attentes et m'offrira ses reliefs les moins communs.

Demain sera frais, vif, acide et réconfortant.
Je changerai de registre et passerai du tango au rapp.
Du rapp au fado.
Du fado au silence.
Du silence au bruit de la ville.

Paris alors se dévoilera. Aussi belle que dans mes souvenirs.
Aussi attractive que ces autres villes dans lesquelles mes jours ont été riches. Mais différente, et neuve, et particulière.

Ni tout à fait la même, ni tout à fait une autre...,
Cher Paul, votre rêve familier éveille bien des échos.

Et pour sa voix, lointaine, et calme, et grave,
elle a l'inflexion des voix chères qui se sont tues.
Cher Verlaine, votre rêve familier est un bel échos.

dimanche 18 avril 2010

fly me to the moon


C'était un superbe samedi, un splendide dimanche, de ceux qui marquent une transition.
L'hiver nous a fait un au revoir plein de tact, tout entier dédié à son successeur: mister springtime, himself!

Un hiver qui s'efface avec classe.
Le soleil est juste chaud, l'air est doux.

Les parcs sont pleins de promeneurs, les chaises du Luxemboug sont toutes garnies d'alanguis de tous types, de types en tout genre, les quais de Seine livrent leurs pavés et bancs aux plus dénudés des parisiens. Mon répondeur a des messages que j'affectionne. Les jours à venir sont empreints de promesses, je me résigne aux belles surprises. Springtime, isn't it?

Donc, je promenais mes yeux encore vifs, mes cernes abysales, mon teint de terre, mon humeur légère et mes kilos hivernaux en trop, aux détours de mes balades favorites, tout nouvellement auréolées de ce soleil franc.
Donc, je promenais mes idées en l'air comme on fait flotter son appât, comme on simulerait la mouche au bout de son fouet.
La seine a des allures de torrents. Mes Repetto sont pourtant très éloignées des cuissardes vertes des pêcheurs à la mouche.
Certainement mon envie d'ailleurs qui se réveille. L'envie d'autres odeurs: celle de l'eau vive, celle des torrents et des lacs. Une envie d'eau douce.
Cette envie qui revient et me taraude avec une belle régularité, est cette fois-ci très différente de mes ressourcements usuels. Généralement c'est vers l'océan qu'elle me porte à cette époque. Ils sont loin en effet l'atlantique, la côte sauvage, les pins, les ajoncs, les orgies d'huitres, le vent qui gifle, un verre de pinault, le chemin des douaniers, les chênes verts couchés à force de vent, le pont du diable, les vagues qui s'éclatent en tumulte.

Cette année, mon esprit a trouvé un point d'équilibre inespéré entre l'eau douce et l'atlantique.

Paris m'offre un ersatz de fraicheur et de vie affleurantes, comme des poissons aux détours d'une roche. Chaque reflet est un signe.
Paris m'offre un souffle. Et même s'il ne me l'offre, je le découvre et le respire pleinement.

Je savoure chaque nuance des feuillages, chaque clarté des couleurs, chaque fossette des sourires anonymes, chaque rire, chaque musique. Il me semble percevoir mieux.
Mon pas est plus léger.
Mon esprit s'échappe.
Des airs prennent le pas de mes pensées.

Fly me to the moon.
Je fredonne pour moi ... to jupiter and mars.
Je trébuche sur un pavé. Je garde le tempo de cette mélodie superbe... in other words... dam dom you. C'est pas dam dom... non, c'est I'm in love with you, in other words...
Mes pensées se kaléidoscopent. Le "You" de la chanson devient une mosaïque dans laquelle joue le soleil. Une espèce de portrait étrange fait de morceaux choisis, agencés sans logique, qui ne ressemble plus à rien ou personne. Ce "You" n'a gardé des souvenirs que leur lumière.

Dans cette apesanteur quasi psychélique, surgit le Louvres où m'ont guidée mes pas.
Je sors de l'empreinte de the voice, j'oublie un temps la mosaïque, je sors de l'onde fade et claire du torrent, je me dégangue de la coque de sel des embruns.
Me revoici parfaite parisienne.
Les torrents sont loin, l'océan est retiré.
Je mange le rouge de mes lèvres, je les mords, je prends une pleine goulée de cet air de Paris.
Je profite juste et pleinement de ce moment, pour ce qu'il est.
Je suis juste à Paris.
Cette journée est splendide, magistrale.
De mes envies de départ, je ne concerverai aujourd'hui que Sinatra comme escorte à cette rencontre avec le printemps.
Fly me to the moon.
Je suis un peu à l'étroit.
Je sais que je repartirai bientôt, d'une façon ou d'une autre. Moins loin que Jupiter ou Mars.
Voici bientôt un an que je suis rentrée. Je suis magnifiquement bien ici. Mais, mais ... un peu d'espace me manque!
Il faut savoir pouvoir partir pour apprécier de rester ou revenir. Savoir que l'on peut. Au moins cela.
Sacrés révélateurs ces changements de saisons, indeed...
Mais je suis bien là, plantée cour carrée du Louvres, dans un rai de soleil, immobile.
Mais je suis bien là, dans cette lumière, diffuse.
Je suis là dans cette lumière qui fait perdre les reliefs.
Dans mon sac, quelques achats.
Parmi des futilités, un DVD coffret, mon Kdo de ce wek end: Let's get lost, un film splendide sur Chet baker.
J'ai vu ce trésor il y a quelques années dans une petite salle de ciné de saint germain of the près.
Je le regarderai plus tard, au retour de Jupiter, ou de Mars.

vendredi 16 avril 2010

devinette...


Je suis dans les méandres d'une forêt de mots,
Je suis d'entre les pages,
Mes faces sont lisses, irisées,
Mes bords sont écornés, déchirés et baillent.
Je passe d'une histoire à une autre,
aussi facilement que les mains qui m'y emportent.
Je ne vaux que par mon usage.

Je suis...
vous doutez?

La facilité que j'apporte a été achetée, parfois.
La facilité que j'apporte a été offerte, généralement.

J'ai un côté désuet.

je suis ...
vous trouvez?

J'ai navigué récemment de Pétropolis, à Guermantes,
de Paris à New York.
J'ai navigué récemment de Stephan à Marcel,
de Leo à Raymond.

je suis...
vous m'envisagez?

J'ai navigué récemment de Zweig à Proust,
de Mallet à Chandler.

je suis ... un marque pages.
vous m'en voulez?

samedi 10 avril 2010

une horloge dans des sacs


Un petit billet, juste pour saluer un anonyme.

Chaque matin ou presque, parfois le soir, je croise station Auber une de ces ombres qui se dessinent sous ces initiales cinglantes "S D F". Une de ces ombres masquées par ces appellations rassurantes qui ne contrôlent que nos appréhensions: "marginal", "paumé", "scotché", "fou" ,"décalé", "débile", "loque".
Chaque matin, certains soirs, je croise cet homme et ses sacs, station Auber, aux pieds des escalators, à l'entrée des tapis roulants.
Qui est cet homme? lui-même le sait-il?
Comment est-il?
Moi-même qui le croise presque tous les jours, parfois certains soirs, je serais en mal de le dire.
Une cinquantaine usée. Il est encore brun. Flou. 1m70. Une cinquantaine élimée, un âge qui s'est fuit.
Une ombre futée finalement: elle sait se dérober aux regards.
Même pas un physique. Rien qui permette de le "placer" dans ma mémoire. Un âge indistinct. Des pieds qui traînent. Même pas une odeur.
Une courbe des épaules. Un effacement qui s'impose. Mais cette volonté, cet acharnement à respecter l'ordre et le rythme du déplacement de ses sacs.
Cette ombre du matin, de certains soirs, est toute entière absorbée par ces incroyables, improbables sacs.
IL a 6 sacs. Gros. Ventrus.
Remplis pour certains d'autres sacs, pliés.
Remplis pour d'autres de journaux, pliés.
Remplis, tous, de choses dont le sens qu'IL y attache m'échappe.
Remplis de ce qui fait sa "place", son "ordre".

Il les déplace 3 par trois, dans un mouvement qui lui appartient.
Il a défini au fil du temps son espace et sa place.

A force de tâtonnements, il a trouvé son rythme, le découpage des journées, le temps qui pour lui a du sens.
Au milieu de la cohue pressée et égotiste, il place ses sacs.
Trois sacs aux pieds de l'escalator , au milieu.
Trois autres sacs pendus à ses bras qu'il transporte en haut de l'escalator. Il va les poser à une place très précise. Toujours au milieu du flux des "pressés" anonymes que nous sommes, nous qui ne déplaçons que nous, nous les "sans sac".
Il va les poser, trois par 3, entre nos pattes.
Puis, il fera le chemin arrière pour aller chercher les trois autres sacs.
Il les montera en haut de l'escalator, à côté des premiers autres.
Il goûtera alors cette harmonie retrouvée: tout son monde, toute sa galaxie de sacs recomposée, plantée au milieu de la cohue. Il ne verra pas les passants pressés qui s'agacent de ce détournement imposé. Il n'entendra pas leurs bougonnements.
Puis il déplacera légèrement trois sacs. Pas forcément les mêmes.
Il prendra un temps infini à repositionner ces 2 groupes de trois sacs. Il retouchera leur alignement, ajustera l'espace entre les 2 groupes de trois sacs.
Il construira une nouvelle composition, de celles que lui seul comprend.

A cet instant précis, il est maître de l'équilibre, roi de sa galaxie
A cet instant précis, il est celui qui définit l'équilibre.
Puis, il prendra trois sacs. Les déplacera jusqu'au prochain point. Et cela se reproduira toute la journée.
Mètre après mètre.
Recomposition des lots de trois sacs, après recomposition des lots de trois sacs.
Trébuchements et détournements des "pressés", après trébuchements et détournements des "pressés".
A vrai dire, je ne le croise que le matin et parfois certains soirs.

Pourtant cet anonyme d'Auber, cet homme aux sacs, cette silhouette, IL me touche.
Combien connaissons-nous de personnes qui chassent cette lubie, cette chimère qu'est le découpage régulier du temps?
Mon homme au sac est un inventeur.
Mon temps à moi n'est pas calibré. Le souvenir d'un instant prendra des heures, des années passeront comme un souffle, le moment présent peut rester suspendu.
Le temps se définit par ce qu'il permet.
Cet homme aux sacs a défini le temps très minutieusement Il a son algorithme, son équation parfaite à aucune inconnue, composée de mètres, du poids et de la couleur des sacs et même de l'agacement des "pressés sans sac".
Il a mon attention et mon respect.
Il a mes excuses de l'avoir évité sans tact. Il a mon admiration face à sa détermination.

Son horloge semble folle, faite de distances, de poids, de couleurs et de bruits.
Mais son horloge est forcément juste: son temps n'a pas de comparaison, il est unique.

Voici finalement mon salut: cette ombre que je croise tous les matins, certains soirs, cette ombre mangée par la silhouette de ses sacs, cette ombre m'est familière et me touche.
Son temps m'est accessible.
Merci à lui

jeudi 8 avril 2010

Promeneuse Et caetera

Je n'aime pas les inter-saisons.
Elles durent sans fin, ne ressemblent à rien, ne se justifient que parce qu'elles ne sont plus ou ce qu'elles ne sont pas encore.
Ces inter saisons sont fatales pour mon moral et ma vitalité. Elle sont plus que fatales à ma bonne mine et à la topographie de mes cernes, rides et autres affaissements cutanés (dixit Galenic, Clarins, etc).
Mais, il faut le reconnaître, les inter saisons sont propices aux balades interminables, et elles sont bougrement photogéniques.
Il reste possible de marcher des heures sans avoir des ampoules plein les orteils, ni les mollets comme des poteaux.
Il est possible de marcher des heures sans avoir le pore dilaté et luisant, l'aisselle auréolée et les reins humides de sueur âcre mais encore parfumés de ces flacons hors de prix (suante mais parisienne que diable!).
Bref,
Ces inter saisons me crèvent littéralement, mais elles ont quelques séduisants avantages pour les promeneuses.

Elles permettent mille choses.
S'inviter par effraction dans les rêves assommés d'un dormeur des tuileries. Lui voler ce moment. Mais le faire sur la pointe des pieds. Shtttttttttttt. Il rêve si lourdement. Il est si profondément enfoui, si visiblement enfuit.









Elles permettent mille choses.

Retrouver les émotions du manège. Jardin du Luxembourg. Un carrousel. Des cheveux de bois, une potence avec des anneaux. Un dragon qui veille.
Les parents font la haie. Les forains font las paons. Les enfants ne savent pas encore qu’ils jouent.
Viser l’anneau. Attendre ce petit miracle. Arriver à chopper ce fichu anneau avec ce bâton ridicule Attendre juste le plaisir de ce « clac » marquant l’enfilage de cet anneau minable sur ce bâton affligent. Attendre et chercher ce petit « clac », bien plus que ce ticket gratuit.

Elles s'autorisent mille choses.
Le WE est prolongé. Pâques, résurrection et chocolats.
Les images se carambolent.
Un jour au Luxembourg, un passage aux Tuileries, des soirées fêlées et touchantes. Et d’autres jours. Du rab. Des moments inattendus.
Et à l’inattendu tout est permis.

Un après-midi au père Lachaise.
La lumière est belle. L’humeur pas définie.
Quelques pensées stériles, des idées de rien, sans fin, sans faim… je suis trop confortable.
Imagnons que je sois totalement là, vivante. Imaginons que sur nos peaux le soleil de printemps réveille autant de reflets que sur les granits, sur les veines de ces pierres.
Imaginons que la pierre et la chair se conjuguent.
Cette balade au père Lachaise a été une belle parenthèse. Belle et sans utilité.
Je demeure désœuvrée, désemparée, interdite, entre les allées, entre les tombes.
Les idées se brouillent. Un genre de reflet indistinct sur les pierres polies.
Je me regarde dans le granit: il est souhaitable que j'aménage, que je prépare mon dernier tour. Pas tout de suite... mais tout de même.
Le temps joue de ces tours! J’ai déjà abusé de la patience du grand ordonnateur.
Et même si ce n'est pas encore pour tout de suite...il faut que je me charge du volume que je souhaite avoir quand je serai « out of order » (qualificatif qui me sied déjà assez bien, parfois!).

Ces chers carabins ont déjà joué de leur métronome. Je suis déjà asynchrone. J'ai la chance de le savoir.
J’en déduis qu’il me reste des milliers de secondes, des centaines d'heures, des dizaines de minutes, des souffles de secondes, des soupçons de vie.
Il me reste une place à moi. Voir un strapontin.

Il me reste un strapontin. Il me reste un rideau pourpre, une scène, un côté cour et un côté jardin. Il me reste un théâtre, un répertoire, une troupe de cabots et des litres de démaquillants, des masses de maquillages gras, collants, obstruants. S'il me reste l'espace d'un faux-cil, il me reste alors la perception des détails, des souffles et des ombres.
Il me reste ce rythme des balades, des promenades.
Le rythme des contre pieds.
Il me reste l'accesssoire Tout l'accessoire: les lalalère et quelques 20 cm de doc sur les concessions à perpétuité (sic…).

Dans un détours de ces balades,

Un clin d’œil encore vif aux silences de sarcophage,
RIP dear and kind regards,

the best 4 U

dimanche 28 mars 2010

Comptine du changement d'heure




Toc toc toc qui va là?
le premier homme de la première heure
Tic et tac, quelle est cette heure?
celle du premier geste, de l'esquisse
Picoti picota
faudrait-il qu'on y croit
Picota picoti
imaginons que si

Toc toc toc qui va là?
le premier geste de la première heure
Tic et tac, quelle est cette heure?
celle du premier homme, de l'esquive
Picoti picota
imaginons qu'on y croit
Picota picoti
faudrait-il que si?

Toc toc toc qui va là?
une heure plus tard, à l'heure juste
Tic et tac, quelle est cette heure?
celle des gestes qui se fleurent
Picoti picota
les souffles se frôlent
Picota picoti
les rôles se floutent

Toc toc toc qui va là?
Picoti picota
Picota picoti

Toc toc toc qui va là?
heureuse que ce soit toi
Picoti picota
qui est las ?
Picota picoti
épris?

Toc toc toc
je suis là
Picoti picota
dans ces bras
Picota picoti
même si

lundi 22 mars 2010

Ne pas céder... esquiver... et finalement


Entre chiens et loups.

Ne pas céder au sommeil, feinter, esquiver la fatigue qui s'invite, s'allier à tous les subterfuges pour la leurrer. Sortir.

Se balader dans la nuit.
Le printemps est là, le ciel est clair, les étoiles se dévoilent (la faute de frappe est corrigée... dévoient avait remplacé dévoilent, l'erreur est trouble). Savourer cette éclaircie nocturne.

Se balader ce soir est un plaisir. L'air est doux, les rues désertes. Paris est si calme.
Nous sommes lundi. Lundi, ce soir où la ville est morte, molle. Ce soir où elle est au ralenti, néanmoins accueillante. Traîner encore. Refaire un tour.
Finalement rentrer. A regret.
La journée a été dense. Il me faut encore dépenser de l'énergie, il me faut aussi me débarrasser de quelques impressions qui justement ne doivent pas impressionner, pas laisser de trace.
Je presse le bouton sur la télécommande. Voyant au vert. Je ne choisis pas le canal.
Un feuilleton. Ça profile et trucide en série.
Les cris, jets de sang et commentaires off font d'excellents bruits de fonds.
Je grignote des wasabi peas.
Il est cette heure qui n'est pas encore la nuit, mais plus vraiment la soirée. Cette heure où il n'est plus temps de téléphoner. Pas recommandé de ressortir. Trop tôt pour dormir. Trop tôt pour laisser la journée se terminer.
Je remets de l'eau dans les vases.
Les 8 amaryllis, trop avancés pour être vendus, offerts par mon fleuriste sont superbes. J'arrange un autre bouquet.
Les profilers ont fini de dénouer les fils barbelés qui tissent l'âme de leur proie.
Télé sur off. Vases rafraîchis.

Je passe un disque. Pas trop fort pour les voisins. Je n'ai pas envie d'écouter la musique au casque.
Ce sera un Requiem, Saint Saens. Psaume XVIII. Un achat de ce week end.
Pas très gai. L'heure de la gaité est passée mais elle laisse son ombre. Splendide et solaire. Elle illumine encore. Pourtant une heure succède à l'autre La place est maintenant au requiem. Sans tristesse. Aucune.
Je prends un livre. Le laisse. En prends un second. L'envie de lire me quitte.
La main à plat sur la couverture du bouquin de Garouste "l'intranquille", j'envisage mes ongles. Ma manucure maison de samedi matin s'écaille très discrètement. Il n'y a que moi pour le voir. Un joli rose tyrien pourtant. De très légères irrégularités se dessinent. Suffisamment, pourtant.
Je vais chercher des cotons. Du dissolvant.
Si seulement tout pouvait se dissoudre aussi facilement.
L'odeur d'acétone est lourde.
Mes mains ont quitté leur masque.

Toujours pas envie de dormir. Toujours envie de repousser le sommeil.
Ne pas lui céder L'esquiver. Imaginer d'autres feintes. Se dire que ce n'est pas raisonnable. Demain il y a école. Et demain, pour se mettre en jambe, la matinée va démarrer pas une préparation de réunion, in english et sur des sujets aussi peu susceptibles de laisser une place à mes talents d'improvisation, que le recueil de données, une validation de scoping, la validation d'un planning...

Demain est à un jet d'aiguilles maintenant, juste quelques heures. Mais c'est le trésor des nuits d'offrir la possibilité de changer les temps.
Je repousse demain aussi loin possible. Je retrouve mes images d'enfant: "demain c'est quand on se réveillera...."
J'oublie demain et laisse Saint Saens reprendre le dessus. Je suis encore aujourd'hui: je ne dors pas.
Premier signe de faiblesse.
Je me frotte à la rider (un peu plus) la paupière de mon oeil gauche.
J'ignore le bâillement que j'étouffe.
Le sommeil s'invite, s'installe entre cet aujourd'hui que j'ai usé jusqu'à la corde et ce demain dont finalement j'accepte les présages.
Demain ce sera double café, anti-cernes, blush, teint pas très frais.
Demain ce seront des envies, des moments à faire passer vite et d'autres à savourer.
Demain ce sera mardi.
Demain j'y suis. Il est 1 heure plus que passée.
Demain sera familier puisque je vais m'endormir à côté de lui.
Demain m'accompagne déjà, je le précède et il m'attendra au réveil.
Je vais finalement céder. Accepter de dormir. Pour attendre ce demain qui ne m'est plus inconnu puisque je l'invite.

mardi 16 mars 2010

appel à contribution....


le 11 février je vous livrais un genre de poème qui s'était posé sur le clavier presque spontanément. Sans nom.
Bien sur, il y avait plein de "autant que possible" dans ces quelques lignes... mais c'était un peu téléphoné comme titre.
Alors, El gato m'en ayant soufflé un, entre deux bouchées nippones, je me suis dit: pourquoi un seul nom quand il n'y en avait aucun ?

a vos suggestions,
en commentaires ou en mails !

dimanche 14 mars 2010

Facettes



Cette boule à facettes énorme, c'était il y a un peu plus d'une semaine à Bobin'o. Spectacle "La clique". Une troupe déjantée dans la pure tradition burlesque, hors norme. Du numéro de trapèze à la prestidigitatrice qui finit son numéro en nu intégral, du coussin péteur du magicien techno à l'homme élastique, du mâle sublime quoique très mouillé, à un chanteur échappé de Priscilla folle du désert, en plus noir, plus gros, plus de tout!

Cette boule à facettes est aussi une sorte de pied de nez à ces samedi soirs paillettes que je ne chéris pas.
Ce n'est pas uniquement parce que les Bee gees me vrillent les tympans que ce soir du Week End est presque toujours la soirée la plus calme de mes semaines.
Tout d'abord, je déteste les liesses collectives préprogrammées. Quant à se retrouver au milieu d'une foule qui se débride autant que ce soit vraiment dans l'excès, que ce soit spontané et communicatif.
Le côté étriqué et prévisible des fêtards du samedi soir est déprimant.
Leurs dérapages ont l'amertume des gueules de bois trop vite chopées et les relents acides des petits matins courbatus mais dénués d'une cerne de plaisir.
Pas beaucoup d'esprit festif dans ces soirées trop préparées, trop attendues, trop "entre soi".
Alors, définitivement je resterai une casanière du samedi, et définitivement une noctambule potentielle tous les autres soirs.

Le samedi est par ailleurs une soirée toute particulière qu'il est dommage de gâcher. La seule soirée de la semaine qui vous appartienne totalement car juste à la jonction de deux jours sur le programme desquels vous avez la main (aux obligations administratives, ménagères et familiales près... bien entendu!).
Le samedi, il reste possible de prendre un bouquin pour le plaisir de lire et sans répondre à un besoin parasite de se "changer les idées". Il reste possible de naviguer dans les piles de CD pour réécouter des morceaux, piochés presque par hasard. Il reste possible de ne rien faire: Juste se laisser ramollir dans un bain, se répandre sur le canapé, se fondre dans la dégustation d'un vin, se vernir les ongles des orteils, évaluer du regard le courrier que l'on n'a même pas ouvert.
Le samedi soir je suis dans la disposition d'esprit la plus favorable pour donner la valeur la plus juste à toutes les choses que je ne fais pas ce soir là et que je remets aux autres jours.
Sauf que ces autres jours, trop occupée à faire, à bien faire souvent, à faire vite aussi, je serai à nouveau un oeil rivé sur le petit bout de la lorgnette, l'autre sur la montre.
Donc le samedi c'est un plaisir délectable, luxueux et parfaitement égoïste: ne pas s'agiter, choisir, et surtout ne pas avoir à donner le change.

Ce samedi a été parfait.
La preuve: il n'y a rien à en dire !

Ce dimanche entre autres moments précieux: au théâtre, une lecture d'extraits de "A la recherche du temps perdu" de mister Proust.
J'ai comme beaucoup renoncé à lire cet auteur. Réputé difficile, barbant, interminable comme ces fameuses phrases, réputé indigeste comme les non moins fameuses madeleines même trempées dans une infusion de tilleul.
Cette lecture alternée par 3 comédiens était émouvante, drôle, caustique, juste.
Je retenterai certainement cet Anapurna littéraire.
Certainement entre 2 romans, un science et vie, les inrockuptibles, un policier, voici et le monde de lundi avec l'analyse des élections.
J'ajouterai aussi à ce méli mélo de mots, juste pour le plaisir du rythme de ses vers, quelques brassées des fleurs de monsieur Baudelaire.
Aucune mélancolie à cela.
Mais, une admiration pour ces artistes orfèvres, qui sertissent parfaitement, avec science, talent et invention, les pierres que chacun y apporte.
Alors, oui clairement relire certains poèmes des fleurs du mal en écoutant Piazzola n'est pas ce que l'on peut imaginer de plus gai, de plus débridé.
Et heureusement, toutes mes soirées ne sont pas aussi calmes.
Mais si j'ajoute à cela qu'il me restait un verre d'un excellent Saint Emilion, et que j'avais tout le canapé pour m'allonger.
Vous l'avez maintenant compris.
C'était juste un moment parfait, plaisant, plein.

Partager ce moment était impossible.
Alors, je n'en ai partagé qu'une facette, celle de "recueillement", le poème livré dans mon dernier billet.
Du coup, c'est une inquiétude que j'ai levée sur mon état d'âme.

Quand je vous dis que c'est dangereux les facettes !